L’épidémie de méningite en République démocratique du Congo souligne la nécessité de renforcer les capacités locales

Image
RDC Map

Credit image : Médécins Sans Frontières (MSF)

Le 8 septembre 2021, la République démocratique du Congo a déclaré une épidémie mortelle de méningite parmi les mineurs de la zone de santé de Banalia, dans la province de TSHOPO, située au nord-est du pays.  Cette zone se situe dans la ceinture africaine de la méningite, sujette à des épidémies imprévisibles de méningite (OMS Afrique). A la date du 19 octobre, un total de 2187 cas suspects et 199 décès (9% de létalité) ont été rapportés (OMS Afrique).

Ces événements tragiques soulèvent des questions importantes qui doivent être abordées si les pays africains veulent gagner la lutte contre la méningite, comme indiqué dans la feuille de route pour vaincre la méningite d'ici 2030.

La première est la nécessité de renforcer les capacités des laboratoires nationaux afin de permettre un diagnostic rapide et précis de la méningite bactérienne. Malgré la présence de nombreux facteurs de risque d'épidémie de méningite, tels que les conditions de vie surpeuplées des mineurs et le fait que la région fasse partie de la ceinture de la méningite, ainsi que la manifestation clinique caractéristique d'un taux de mortalité élevé, de la fièvre et une raideur de la nuque, la méningite n'a étonnamment pas été la première préoccupation. Au lieu de cela, des échantillons ont été collectés pour tester la maladie à virus Ebola, la shigellose et la salmonellose (Actualités de l’OMS sur les épidémies) au laboratoire de l'Institut national de recherche biomédicale (INRB) à Kinshasa. Lorsque la méningite a finalement été suspectée, le laboratoire national était incapable de détecter Neisseria meningitidis et les échantillons ont été expédiés en France, où l'Institut Pasteur de Paris a confirmé l'épidémie à Neisseria meningitidis de sérogroupe W. Le manque de capacités locales est probablement dû à un manque de réactifs, d'expérience et/ou de formation plutôt qu'à un manque d'équipement, puisque des techniques moléculaires similaires sont utilisées pour détecter Ebola. Cela a entraîné un retard de trois mois dans la confirmation de l'épidémie. Un diagnostic et un traitement rapides de la méningite sont essentiels pour une gestion appropriée des cas et pour contenir l'épidémie ; l'envoi d'échantillons à l'étranger est non seulement lent et inefficace, mais aussi contre-productif lorsque l'objectif est de renforcer les capacités des laboratoires locaux.

La seconde question est le besoin urgent d'un vaccin abordable offrant une protection contre plusieurs sérogroupes de méningocoques. Le conjugué pentavalent NmCV-5 (ACWXY) est produit dans la même installation que MenAfriVac et son développement clinique est bien avancé. Il faut maintenant planifier sa mise en œuvre à grande échelle. Suite au succès de MenAfriVac, le vaccin conjugué monovalent contre la maladie causée par le sérogroupe A, un certain niveau de complaisance est apparu concernant les épidémies de méningite dans de nombreux pays africains. Les maladies méningococcique de sérogroupe W peuvent se présenter avec des symptômes atypiques, notamment des douleurs abdominales et des diarrhées. Les gens ne savent peut-être pas que MenAfriVac ne protège que contre les maladies causées par les méningocoques du sérogroupe A, et que d'autres sérogroupes sont également à l'origine de maladies à méningocoques.  Ils peuvent aussi avoir oublié à quel point ces épidémies peuvent être imprévisibles et stressantes pour des systèmes de santé publique déjà très sollicités. La vaccination réactive avec les vaccins polysaccharidiques actuellement disponibles n'est pas la seule option pour gérer les épidémies. Comme l'a clairement démontré la mise en œuvre de MenAfriVac, les mesures préventives sont bien plus efficaces, surtout lorsqu'elles sont associées à des campagnes d'éducation de la population sur les symptômes et les facteurs de risque associés à cette maladie. L'utilisation généralisée de vaccins conjugués multivalents sera bientôt une option viable si des financements peuvent être identifiés.

Enfin, cette épidémie pose la question de la saisonnalité des maladies à méningocoques en Afrique, puisqu'elle a débuté en juillet en dehors de la saison dite de la méningite. Traditionnellement, la méningite dans la ceinture africaine de la méningite est attendue pendant la saison sèche, lorsque le vent d'Harmattan souffle, généralement entre novembre et mars selon le pays. Un retard des pluies peut avoir contribué à l'épidémie au Congo, et comme les schémas météorologiques deviennent de plus en plus imprévisibles avec le changement climatique, le personnel médical doit rester vigilant.

Les prochaines épidémies seront imprévisibles et, bien que nous ne puissions pas répondre à la question de savoir quand et où, il est important que les autorités sanitaires africaines restent attentives au risque et s'assurent qu'elles disposent des capacités de laboratoire nécessaires pour identifier rapidement l'organisme responsable et réagir efficacement pour contenir l'épidémie et sauver des vies.

 

Références

https://reliefweb.int/report/democratic-republic-congo/province-de-la-tshopo-r-publique-d-mocratique-du-congo-epid-mie-10

https://www.afro.who.int/fr/news/la-republique-democratique-du-congo-declare-une-flambee-de-meningite-dans-une-province-du-0

https://www.who.int/emergencies/disease-outbreak-news/item/meningitis---democratic-republic-of-the-congo

Funded & supported by